Dans un poème indocile, Thierno Seydou Sall plaida pour l’instauration de l’Institut fictionnel d’Afrique Noire1. Abouté au musée Théodore Monod d’art africain, cet institut ne serait pas un territoire fermé ou amarré, mais une figuration de l’a-venir, pour affirmer des avenirs possibles, nos aspirations à la métamorphose.
S’imposant comme un horizon, cet institut offrirait un espace, un temps, de recherche, d’ancrage et de fuite. Il contribuerait à l’effort commun engagé pour quitter les vieilles catégories (à la fois mortes et vivantes), dépasser les vocations naturalistes ou esthétiques des collections constituées durant la période coloniale et défaire les spectres des chronologies normatives. Sa responsabilité serait de mettre à mal les logiques de découpage et de classification, d’invalider les oppositions dichotomiques (telles que nature-culture, fiction-réalité), d’enrayer la monstration pétrifiée des objets et combattre encore certaines doxas théoriques, clôtures académiques et routines institutionnelles. La proposition qu’il ferait est d’inclure d’autres récits, d’autres savoirs et connaissances et de transmettre des absences. D’appréhender d’autres relations complexes et mouvantes qui se jouent entre pa.ma.trimoines, territoires, histoires, mémoires, traductions, liaisons, transmissions, transformations afin de mieux les connaître mais aussi les bouleverser et les fabuler. De modifier nos sensibilités, de cultiver d’autres rapports à soi même et au monde par les univers de l’art, la poésie, avec leurs spéculations2. De s’affirmer comme une matrice de projections et de germinations pour surmonter les béances de l’histoire collective, avec ses manques, ses vides, ses approximations, ses leurres, ses malaises. De considérer l’Histoire comme le récit de tout ce qui naît, de tout ce qui pourrait advenir ou devenir. De retravailler les fictions, de diffracter et multiplier les récits ouverts, afin de créer un milieu plus dense du fait de la variété de leurs versions. De trouver de nouvelles trames et directions narratives, de multiples ressorts, une fabrique permanente de sens possibles qui nous entraînent ailleurs, et qui nous déroutent. De laisser parler les êtres et les choses dans leurs différents modes d’existence, de regarder au-delà, c’est à dire vers ce qui mène à plus d’existence. Cet Institut fictionnel d’Afrique Noire serait une constellation en expansion de gestes, d’actes, de performances, de migrances, de rêves, de transes, de configurations, de conjonctions, de cohabitations, de tensions, non patrimonialisables, permettant d’être parmi les choses (et non au-dessus d’elles) et de déployer une expression toujours renouvelée. Tel un intercesseur, cet institut soutiendrait les récits et les objets en les considérant comme des vecteurs de vitalité, construisant des relations affectées, une écologie des êtres ou des choses tenant compte de leur puissance d’agir et de l’effectivité de leur présence.
Ce numéro soutient la création d’un tel espace. Il est pensé comme une figuration textuelle de ce nouvel institut et donne corps à une pluralité de récits et d’engagements intellectuels, sociaux, artistiques, politiques transformant nos communautés de savoir, travaillés par les devenirs de l’IFAN ou travaillant les devenirs de l’IFAN. Ici, le musée Théodore Monod accepte son histoire de disparitions et d’absences, ses implicites et impensés. L’Institut fictionnel d’Afrique Noire connaît ses ainés, l’Institut Français d’Afrique Noire (créé en 1936) devenu l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (en 1966) dont la chronologie est longue de 85 ans. Il sait que l’histoire de la recherche scientifique en terrain colonial et les dispositifs de constitution des savoirs qu’elle a établi se sont appuyés sur des incomplétudes, des incohérences et donc des fictions et des fables3, qu’il a fallu déconstruire (qu’il faut encore déconstruire) pour gagner les indépendances. Faut-il rappeler que la science qui s’est mise en place en Afrique de l’ouest – nommée africanisme – à partir des années 1930 s’est adossée à une idéologie de la supériorité de l’Europe colonisatrice et de l’étrangeté radicale de l’Afrique4 ? Identifier et nommer en français, classer et trier ont conduit – sous couvert d’une raison dite scientifique, objective et impartiale – à réifier, inférioriser et rendre exotique l’Afrique, parfois dans le déni de la conquête coloniale mais souvent pour mieux servir celle-ci5. Comme l’écrivent Marie-Aude Fouéré, Ophélie Rillon et Marie-Emmanuelle Pommerolle : « Les règles de la méthode ont souvent été bafouées aboutissant à des généralisations sans socle empirique, ou au contraire, appuyées sur un excès de certaines données au détriment d’autres données et du principe de recoupement, mais le manquement au principe éthique dans la conduite de la recherche scientifique explique que les africain.e.s ont couramment été traité.e.s non pas comme les sujets de la connaissance mais comme des choses à connaître, ainsi qu’à contrôler et à transformer. Des tendances à enchanter et idéaliser l’Afrique ont également travaillé l’africanisme dont le savoir s’est construit en dehors des formes du savoir intellectuel (Hountoundji, 2002, Doquet et Broqua, 2019) »6.
L’Institut fictionnel d’Afrique Noire, qui se peuple de promoteur.ice.s de recherches, parfois inattendu.e.s (et parfois illustres comme celles et ceux invoqués par Thierno Seydou Sall), refuse le démembrement des cultures par l’explication et la mise à nu, dépasse la césure entre patrimoine matériel et immatériel, pense un champ de la muséographie aux occurrences multiples, en perpétuelle extension, et se laisse instruire par les événements. Pour ce faire, il interroge notamment le partage net entre le champ scientifique et les autres régimes de productions intellectuelles – littérature, philosophie, arts plastiques, auxquelles est souvent déniée une valeur épistémique propre – et considère qu’il n’est pas pertinent. Depuis trente ans, les interactions complexes sur une histoire longue, du XVIe au XXIe siècle, entre ces modes d’écriture et de pensée, progressivement constituées en champs disciplinaires distincts ont largement été analysées par les sciences humaines. Ce constat d’interdépendance soulève de multiples questions. De quel ordre sont les rapports que la science entretient avec l’imaginaire ? Jusqu’à quel point un tel dialogue peut-il se nouer sans qu’il y ait confusion ? Un fait scientifique et une œuvre existent, répond Bruno Latour, mais aucun ne se définit selon la même manière d’être7. Interroger le mode d’existence d’un être, c’est situer celui-ci dans le registre de vérité qui lui convient, mais également l’inscrire dans le rapport créateur qui a présidé à son instauration.
Ce numéro s’ouvre par un hommage au professeur de philosophie Ibrahima Sow afin d’exposer son ambitieux projet : Le laboratoire de l’imaginaire fondé au début des années 2000 au sein de l’IFAN/Cheikh Anta Diop. Le travail de Sow, qui s’intéressa notamment au maraboutage et aux pratiques divinatoires (dont l’oniromancie), permet de délaisser une vision du patrimoine réduite à des artefacts sclérosés dans des vitrines. En reconsidérant les représentations socio-culturelles et l’existence d’un patrimoine immatériel constitué de croyances très persistantes dans la société sénégalaise, son Laboratoire de l’imaginaire avait pour objectif « l’analyse critique et la description des représentations et perceptions de visions du monde passéistes », mais voulait aussi nourrir des interrogations et « des perspectives futuristes et avant-gardistes pour informer des dynamiques créatrices, (…) de nouveaux horizons qui permettent d’inventer les rêves de demain, de renouveler la réalité du présent ». La question des rêves est au cœur de l’article « L’onirothèque de l’IFAN, collecter les rêves à la fin de la période coloniale » de Julien Bondaz, ethnologue, qui analyse le projet de « constituer le champ onirique en un inépuisable gisement » caractérisant les recherches conduites à l’Institut Français d’Afrique Noire dès sa création en 1936. Par une étude minutieuse du « souci d’inventaire ethnologique des rêves », de ses différents auteurs, de leurs conceptions, il en examine leurs motivations, énonce « les affinités entre la notation des rêves et les collectes ethnographiques » et montre les impasses de ces tentations. « A l’heure actuelle », écrit-il « les musées africains, à commencer par le musée Théodore Monod d’art africain, (…) n’ont-ils pas à se réapproprier muséologiquement tout à la fois les rêves et donc la vie ? »
Ce numéro prolonge notre attention à la photothèque de l’IFAN et à celle du musée Théodore Monod – qui en fait partie – qui contient un patrimoine visuel et matériel (60 000 tirages) de l’Afrique de l’Ouest produit durant la période coloniale et largement méconnu. Ce fond rappelle que l’imaginaire colonial s’est inscrit dans une culture visuelle. La pulsion scopique et la vision ont été pensées comme un préalable cognitif. Et l’administration coloniale a inventé de nombreux dispositifs visuels qui furent autant d’objets de surveillance que de sciences et de conservation. Depuis plusieurs années, l’historiographie de ces outils est en plein essor. Anaïs Mauurin, historienne de la photographie, dans « L’Afrique de l’ouest dans les tiroirs. Documentation scientifique et photographie coloniale à la photothèque de l’IFAN (Dakar) »8, a analysé « les enjeux de cette photothèque en élucidant les logiques qui ont présidé à sa constitution, la façon dont la constitution d’une documentation scientifique visuelle était imbriquée dans l’élaboration de l’iconographie coloniale » afin de « fournir de la documentation ». Jusqu’à maintenant, malgré l’entreprise de numérisation, cette photothèque reste « une capsule temporelle marquée par un regard colonial suspendu9 », elle n’a pas été revalorisée comme le défendait Kady Kahn Touré10. Dans ce nouvel article, intitulé « Les collections photographiques de l’Institut Français d’Afrique Noire. Ressaisir la géographie d’un patrimoine dispersé », Anaïs Mauurin s’est intéressée à l’organisation de ce vaste réseau des Centrifan déployé à l’échelle de l’AOF qui a constitué des fonds photographiques qui ont été disséminés lors de la colonisation puis lors des indépendances. Cette cartographie est au cœur du projet photIFAN qui permettra d’évaluer la situation actuelle de ces matériaux visuels11. Il nous a semblé nécessaire d’ouvrir ces fonds d’archives et ces images et nous avons proposé, dans le cadre du projet de recherche Ateliers de Troubles épistémologiques12, au photographe Ibrahima Thiam d’effectuer une résidence dans les photothèques de l’IFAN/UCAD et du musée T. Monod. Sa recherche prend forme ici en une proposition photographique et un entretien avec l’historienne de la photographie Giulia Paoletti. Ibrahima Thiam ne s’est pas focalisé sur la dimension coloniale de ces archives13, il s’est intéressé à leurs potentialités contemporaines, ce qui conduit à nuancer la naturalisation dont leur contenu peut faire l’objet et à décoloniser le champ visuel. Pour lui, la photo est réminiscence, support d’une mémoire collective lébou et des rites du Ndeup. Elle affirme le désir d’être souvenu et le désir de se souvenir, de garder en mémoire des gestes, des costumes, des pratiques et des savoirs : « une manière de prendre soin du vivant. Un désir de vie commune ». Se souvenir, c’est un acte de création, c’est reconnecter, ressusciter, toucher au vivant, par des formes d’intention et d’agentivité. Son installation des photographies au sein du parc du musée Théodore Monod leur donne un corps et nourrit une forme de résistance qui s’opère par la matérialisation de ces images en un espace social plus dense.
Quatre contributions analysent des œuvres contemporaines qui établissent des liens entre patrimoine ancien et réalités contemporaines. Dans « Que font les masques à présent ? », Emmanuelle Chérel considère des œuvres de Zina Saro-Wiwa, Hervé Youmbi et François Knoetze qui ressaisissent et s’emparent de masques africains. Chacune d’elles interpelle, à sa manière, leurs statuts, leurs fonctions voire leurs lieux d’apparition (performance rituelle, musée, galerie, rue,…) en révélant les différentes qualifications actuelles de ces objets, les processus qui les ont transformés mais aussi les effets qu’ils produisent. Si l’histoire des masques est, entre autre, liée à la colonisation, associée aux valeurs et mythes de l’histoire occidentale de l’art, la force de ces propositions vient de ce qu’elles considèrent la « pluralité ontologique14 » de ces choses vivantes et leur puissance agissante. Elles invitent à réfléchir à comment les humains reconfigurent le vivant, en prenant en compte les multiples modalités de la figuration autant que les pouvoirs de l’invisible15. Les masques anciens et contemporains sont tels des réserves où quelque chose d’autre se trame, se tient disponible. L’artiste Ruth Colette Afane Belinga écrit sur ses performances Génie Go (2016) et Au jardin d’Eden (2021) qui tissent des liens entre la forêt, patrimoine matériel et immatériel transformé en produit d’exploitation et menacé par la déforestation, et la situation des femmes. Tout en montrant des relations que ses œuvres entretiennent avec les performances rituelles du Cameroun, elle analyse ses propositions qui « s’inscrivent au moment où les écosystèmes s’effondrent dans un laxisme politique indécent ». La commissaire d’exposition Oulimata Gueye explicite les intentions de « L’université des futurs africains » (2021), qu’elle a conçue et présentée au Lieu Unique à Nantes entre avril et août 2021, et les concepts de futur et d’histofuturisme travaillés par les nombreuses œuvres de cette exposition. Par la convocation de savoirs anciens, l’usages des nouveaux médias, l’écriture spéculative, le recours à l’invention et à l’imagination, les artistes réuni.e.s construisent de nouvelles narrations qui invitent à réfléchir aux futurs d’un monde interdépendant, pensé depuis l’Afrique. Enfin, Diane Cescutti, artiste, approche dans son texte poétique la piste sonore Quantum Mecanic (2020) de l’artiste Josèfa Ntjam. Ce texte déclamé, lecture performée, en spoken word, donne à entendre sa voix modifiée – par des logiciels multimédia – sur fond de nappes électroniques minimalistes ponctuées de samples et de loops. Au fil d’une plongée poétique et atmosphérique hypnotisante, Josèfa Ntjam joue avec les mots, leurs sonorités, leurs rythmes, leur agencement, passe du français à l’anglais, multiplie références, récits, symboles, strates d’histoire et de temps. En invitant à la décolonisation d’internet, elle escamote nos imaginaires collectifs, nos évidences, nos déterminations : « Je disparais dans l’assignation du vous, je, elle, nous, vous, je, je. Je crache en folie les fantasmes auxquels je suis assignée. » Son texte brouille les définitions des identités collectives et individuelles et propose comme stratégie de survie « d’échapper à toute nomination en prenant les attributs d’un objet quantique qui n’est pas s’en rappeler les cosmogonies bantoues, tel un insaisissable masque-avatar permettant d’habiter le trouble ». Passé, présent, futur, ici, ailleurs s’enchâssent pour composer de nouvelles narrations, hybrides, arborescentes, mutantes, car « nous sommes constellaires ». Les mots résonnent comme un appel à rester toujours vigilant.e. et à aspirer à des futurs plus justes.
Ce numéro se termine en une ouverture sur d’autres types de savoirs, de mémoire, de transmission et d’archives vivantes en donnant à écouter des chansons et des textes réalisés pour le Musée du souffle, qui est un projet de collection imaginé par l’auteur, artiste et producteur Olivier Marboeuf. La collection dont il est question est composée des traces sonores, cris de colère, refrains des émeutes, chants de révoltes, de revendications, de manifestations, de mouvements de contestation du Sud Global. Fou malade, rappeur et militant du collectif sénégalais Y’en a marre, Rossi Jacques Casimir, James Désiris et Zakh Turin, acteurs du The Living and the Dead Ensemble à Port-au-Prince en Haïti, donnent la voix à la dureté quotidienne – voire à la violence ordinaire vécue notamment par une grande partie des populations sénégalaises et haïtiennes qui se trouvent prises dans les impasses du capitalisme néolibéral planétaire – et aux résistances qu’elles y opposent. Ils jouent de différentes formes d’oralité et de traduction mais en générant également différents niveaux d’opacité par le côtoiement des langues, le recours à la poésie, la présence de l’intraduisibilité. Leur proposition marque l’impatience, l’urgence, et précipite la mutation collective, en invitant à des processus de luttes. L’instant est décisif là où le futur est obturé, le temps est aussi l’espace, celui du lieu propice à la « praxis transformatrice », à l’autodétermination. Le moment est opportun afin de faire advenir le non encore, un avenir commun. Le musée est alors un institut des mondes possibles chargé du souffle des vivants, le corps et la voix y sont essentiels, forment une histoire et une force de création afin de constituer un terreau pour que les peuples puissent vivre autrement. Dès lors, le Musée du souffle influe sur ce qui pourrait être des conditionnels, des hypothèses inaperçues, afin d’être là dans les temps qui s’élancent, de suspendre les futurs déjà écrits, de rechercher des coprésences, de nouvelles alliances, des inattendus, des mobilisations.
L’Institut fictionnel d’Afrique Noire, dont le F pourrait donc aussi celui de Futur, est le lieu d’une transformation d’un état à un autre. Un chantier, un atelier, où il est question de passages et d’interrogations. Ainsi l’institut pourrait également sonder son A et plus encore son N16. En considérant sa puissance de transformation (par l’écriture notamment), sa contribution à la métamorphose, au métabolisme, à de nouvelles potentialités, l’IFAN est un organisme rizhomatique et vivant, favorisant les hybridations, les contaminations, les processus, les connexions, les circulations, les relations, les imbrications, les interdépendances, les inséparations, les dynamiques, les tensions, les frictions, les transmission de mouvements, les actes de tenir ensemble17. Il cultive des régimes de vitalité et focalise l’attention sur des naissances.
Les histoires, par exemple, s’y fabriquent et se connectent les unes aux autres, de sorte à former une toile, dont n’importe quel point peut donner naissance à une nouvelle direction narrative. Elles en suscitent d’autres, multiplient les bifurcations, laissent d’autres hypothèses déambuler dans les mises en lien. Tous ces récits, récits de récits, s’enchevêtrent et cultivent l’art de la coexistence d’histoires hétérogènes. Ils invitent aussi au redéploiement des rêves et des potentiels, traversent des territoires réels et imaginaires, même si souvent les deux se confondent. Ainsi, les histoires déploient des possibles activement, c’est leur manière d’être, leur puissance, leur force, elles sont des énoncés qui agissent, des récits qui relaient des présences qui affectent et qui font agir. Leur puissance incantatoire ressuscite des présences et appelle, de ce fait d’autres histoires, suite d’apparitions et de disparitions, désir de suite, désir de vitalité, qui composent avec la présence, où se fabrique l’être.
Cet IFAN s’incarnera en d’autres formes au musée Théodore Monod d’art africain dans l’exposition Teg Bët Gëstu Gi initiée par le projet Ateliers de Troubles épistémologiques lors de la biennale de Dakar du 19 mai au 21 juin 2022.
« Plaidoyer pour la résurrection de l’Institut fictionnel d’Afrique Noire », Troubles dans les collections, numéro 1, « La vie métamorphique des objets », https://troublesdanslescollections.fr/2020/10/09/article-9-revue-1/ ↩
Nous pouvons nous demander si Thierno Seydou Sall n’invoquait pas le terme grec Mouseion, qui vient de « muse » et désignait dans ses premières définitions, un lieu inspirant le poète, où l’on pratique tous les arts, un lieu de vie, un institut de recherche où se déroulaient les assemblées de savants, doté d’une bibliothèque et d’une école ? ↩
Devenu un classique dès sa parution en 1988, l’ouvrage de Valentin Y. Mudimbe, L’Invention de l’Afrique – philosophie et ordre de la connaissance », qui a opéré une mutation conceptuelle comparable à celle de la discussion provoquée par L’Orientalisme d’Edward Saïd (Seuil (1978), 1980), a été traduit de l’anglais par Laurent Vannini cette année par Présence africaine. Pour rappel, Mudimbe, analyse la bibliothèque coloniale (les discours d’explorateurs, d’agents coloniaux, d’anthropologues et de missionnaires) en montrant le façonnement d’un savoir sur le continent marqué par les cadres du regard occidental. ↩
Emmanuelle Sibeud, Une science impériale pour l’Afrique ? La construction des savoirs africanistes en France 1878-1930, Paris, Éditions de l’EHESS, 2002. ↩
Frantz.Fanon, Peau noire, masques blancs, Paris, Le Seuil, 1952. ↩
Voir le texte passionnant de Marie-Aude Fouéré, Ophélie Rillon et Marie-Emmanuelle Pommerolle, Pourquoi Sources ? Rigueur empirique, réflexivité et archivage en sciences humaines et sociales et dans les études africaines, Sources. Matériaux & Terrains en études africaines, 2020, pp. 1-21, https://www.sources-journal.org/77 ↩
Bruno Latour affirme qu’il faut accepter qu’il y ait plusieurs régimes de vérité, plusieurs types de raison, plusieurs modes d’existence dont les sciences, les techniques, mais aussi le droit, la religion, la politique et, l’économie. Voir Une anthropologie des Modernes, Paris, La Découverte, 2012. ↩
Anaïs Mauurin, « L’Afrique de l’Ouest dans les tiroirs. Documentation scientifique et photographie coloniale à la photothèque de l’IFAN (Dakar) », Photographica, n°1, 2020, https://devisu.inha.fr/photographica/193. ↩
Op. Cit. ↩
Kady Kahn Touré « Pour valoriser les fonds de la photothèque de l’IFAN », Documentaliste, sciences de l’information, vol. 37, no 3-4, 2000, p. 174-181. ↩
Depuis 2018, le musée Théodore Monod d’art africain et l’École des beaux-arts de Nantes Saint-Nazaire mènent un projet de recherche international intitulé Ateliers de troubles épistémologiques, conçu par El Hadji Malick Ndiaye et Emmanuelle Chérel. Articulant recherche, production et enseignement, il revisite les notions de patrimoine, les conceptions muséographiques et certains savoirs à partir de la collection du musée T. Monod. ↩
Sur les questions multiples posées par l’usage des archives visuelles coloniales et la décolonisation le champ visuel en Afrique, voir par exemple, Sandrine Colard « The After life of a Colonial Photographic Archive: The Subjective Legacy of InforCongo », Critical Interventions, 2018, 12:2, 117-139, DOI: 10.1080/19301944.2018.1492280, ou Maëline Le Lay, Dominique Malaquais, Nadine Siegert (dir.), Archive (re)mix. Vues d’Afrique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015. ↩
Voir les travaux de William James, Étienne Souriau, Philippe Descola. ↩
Marie Mauzé, Perig Pitrou (dir.), Reconfigurer le vivant. Des organismes aux artefacts, coll. « Cahiers d’anthropologie sociale », n° 19, 2021. Voir aussi Philippe Descola, Les Formes du visible, Paris, Seuil, 2021. ↩
Le terme d’Afrique noire était utilisé tout au long du XIXe siècle, dans le contexte colonial, pour désigner la région occidentale et centrale au sud du désert saharien. Il serait intéressant d’étudier les nombreuses discussions qui ont eu lieu à l’Institut Fondamental d’Afrique Noire et qui n’ont pas conduit à abandonner cette terminologie afin également de mieux identifier les significations données au Sénégal aux termes de monde noir, de civilisations noires, etc. ↩
Clementine Deliss, « Manifesto for the Rights of Access to Colonial Collections Sequestered in Western Europe », Dakar, Mai 2018, The Metabolic Museum, Berlin, Hatje Cantz, 2020, p. 114-119. ↩
Ibrahima Sow, La symbolique de l’imaginaire, 2008.
Notes de Bohumil Holas à propos du Cahier Ponty de Moustaf Wade, fonds Bohumil Holas, 33AP, archives du musée du quai Branly-Jacques Chirac
Pierre Potentier, Section Photo, la clichothèque, Dakar, 1949, tirage argentique, 12 x 9 cm, Université de Dakar, Photothèque de l’IFAN, casier « Recherche scientifique », B.49.2330
Ibrahima Thiam, Dem ak tey, installation de reproductions de photographies de la collection de l’IFAN dans le parc du Musée T. Monod d’art africain, Août 2021.
Francois Knoetze, Core Dump Dakar, vidéo, 2018 ©production-still-by-mouhamadou-diene.-featuring-bamba-diangne.
Ruth Colette Afane Belinga, My name is, performance, 2018©RB
Affiche Université des Futurs Africains, 2021, le lieu unique, design graphique Emilie Aurat
Notes sur l’affiche réalisée par Emilie Aurat : À partir de 1830, une trentaine systèmes d’écriture ont été créés en Afrique, soit dans l’objectif de «s’adapter» à une culture extérieure, soit pour y résister et affirmer les cultures locales. Ils sont donc, pour la plupart, porteurs d’un héritage de formes graphiques endogènes et imprégnés de contextes sociétaux et politiques. Ces problématiques identitaires ont influencé leur développement et leur usage encore marginalisés. Aujourd’hui, designer, artistes et experts questionnent leur futur à travers leur encodage leur design typographique. L’affiche de l’UFA souligne la propension des systèmes d’écritures à être représentatifs de tout savoirs et savoir-faire du continent africain. C’est pourquoi elle aborde la questions des futurs des savoirs africains à travers une proposition exclusivement typographique. Pour aller au-delà du simple dessin de caractère, trois mots relatifs aux savoir et à la communication ont été choisis dans trois systèmes d’écriture africains différents. Celles-ci sont considérées comme des esquisses: elles ont été dessinées en contour. Enfin, le point d’interrogation Vaï s’allie aux sigle UFA afin d’interroger et souligner la notion d’Université des Futurs Africain, et devient le point de repère de l’exposition.
Josèfa Ntjam, Hilolombi, vidéo, 2018