Des objets en excès et des [im]possibilités à décoloniser les musées

Rossila Goussanou et Fogha Mc Cornilius Refem

Statue de Ngonnso, fondatrice du royaume Nso au Nord-Ouest du Cameroun, exposée au Musée HUMBOLDT à Berlin jusqu’à l’été 2022. Le gouvernement allemand a annoncé sa restitution en juin 2022. Fogha, 2022.
Ce texte est issu d’une conversation enregistrée en septembre 2022, après le festival Dekoloniale et différentes table-rondes co-organisées par le groupe de recherche « Reconnecting ‘Objects’ » lors de la 12ème Biennale d’art contemporain de Berlin sous la direction curatoriale de l’artiste Kader Attia, et modéré par Marie Helene Pereira. Les débats collectifs sur la restitution, la réparation et les mémoires coloniales ont alimenté notre échange. Remanié à plusieurs reprises, le texte prend une forme hybride : il est né d’une conversation autour des positionnements de Fogha pour finalement permettre à nos voix de se confondre et offrir une mise en perspective de nos recherches.

La décolonisation « en action » du XXème siècle conçue comme réponse nécessaire à la colonisation nous semble avoir été remplacée aujourd’hui par à une nouvelle phase, souvent plus institutionnelle. Depuis le début des années 2000, amenées par les mobilisations sociales et mémorielles, par les travaux des chercheur.es et par les dénonciations d’un système d’exploitation persistant, les réflexions sur la décolonisation ont progressivement gagné les universités, les musées jusqu’à entrer dans les agendas politiques des anciennes puissances coloniales1.

Ce processus est marqué par de nombreuses contradictions. On observe par exemple que les débats sont captés par leur inscription dans l’économie capitaliste, autant en Europe que sur le continent africain : par des accès payants à des contenus théoriques, par des attentes financières sur la restitution d’œuvres, telle que l’essor que le secteur touristique pourrait prendre – comme les évolutions récentes au Bénin en témoignent par exemple – ou encore par le financement de recherches sur ces questions par des multinationales occidentales qui sont pourtant investies dans l’extraction minière en Afrique. Par ailleurs, si les structures héritées de la colonisation servent actuellement d’espaces intellectuels pour la réflexion décoloniale, elles ont bien souvent « professionnalisé » les débats. Cette professionnalisation s’accompagne d’exigences sur les qualifications requises pour être en mesure de s’exprimer et d’agir : il faut avoir lu tel ou tel livre, posséder tel ou tel diplôme et souvent savoir s’exprimer dans les langues des anciens empires coloniaux. Il y a un réel « gate keeping » [contrôle d’accès] à la prise de parole, au droit de participer au débat et une sélection des locuteur.ice.s. En même temps, les offres et les demandes prolifèrent : les universités, les musées, les maisons d’édition, les médias recherchent de plus en plus des africain.e.s ou afro-descendant.e.s qui parlent de décolonisation. Cela est problématique et conduit à s’interroger sur les conséquences – en Europe comme en Afrique – de la transcription des concepts extra-occidentaux, comme la justice, l’art ou encore le musée. Cet article propose de réfléchir à ces contradictions et à leur visibilité nouvelle, notamment amenée par les dynamiques de restitution des biens matériels africains.

En effet, les débats sur la décolonisation se sont renforcés à partir de la fin des années 2010. Les actions menées par certains pays européens (France, Royaume-Uni, Allemagne, Belgique, Pays-Bas mais aussi la Suisse2 en faveur du retour des objets3 culturels spoliés pendant leur colonisation de l’Afrique, ont largement offert une visibilité nouvelle aux débats sur la restitution. Ce processus a permis de revenir sur une histoire partagée, celle de la colonisation4. Il marque une rupture historique, mais aussi politique et épistémologique, car les demandes de restitution des biens matériels – qui datent de la période des indépendances – se voyaient jusqu’à présent opposer une fin de non-recevoir. Dans les pays européens les musées dits d’art et d’ethnographie constitués sur des collections coloniales sont actuellement présentés comme étant des espaces institutionnels privilégiés pour penser la colonisation et/ou la décolonisation. Des programmes de recherches et des expositions5 ont été initiés sur les collectes, la provenance et la muséographie des objets ou encore la taxinomie en vigueur. Cependant, il est important de prendre du recul et de se pencher sur les raisons qui amènent les musées à devenir les espaces emblématiques de ces reconsidérations du passé colonial. Leur histoire est étroitement liée à la colonisation ; à leur manière, ils y ont contribué en la stabilisant. Les premiers musées ethnographiques, tout comme les expositions universelles du XIXe siècle, ont servi à légitimer la « mission civilisatrice » portée par les conquêtes coloniales et à renforcer l’adhésion des visiteurs et visiteuses aux idéologies impériales à travers la présentation de cultures et d’objets provenant des colonies. Ces derniers étaient présentés de manière stéréotypée et simplifiée, selon des critères ethnocentriques et des classifications arbitraires qui ne reflétaient pas les réalités sociales et culturelles des populations concernées.

Ainsi, de nombreuses institutions muséales occidentales, sensibles aux réflexions postcoloniales, sont traversées par de profondes remises en question, qui pourraient conduire à la redéfinition des concepts d’art, de culture ou d’esthétique. Elles ont emboîté le pas aux nombreux débats tenus sur le développement des musées coloniaux et post-coloniaux africains, à la faveur par exemple du programme AFRICOM lancé en 1991. Pourtant, la situation est plus complexe. Dans certains cas, les musées semblent être passés des expéditions punitives aux « expositions punitives », selon l’expression de Fogha Refem. À l’image des « white centric exhibition »6 qui présentent l’histoire de l’esclavage à partir de l’organisation des plantations et/ou se concentrent sur l’univers des Blancs et des dominants, les « expositions punitives » reposent sur une narration glorieuse des conquêtes coloniales, sur la monstration des objets comme des butins, sur l’absence d’explications claires concernant la provenance, et sur la conservation de dispositifs scénographiques réifiant les objets. Jusqu’à présent, certains musées – occidentaux mais aussi africains – restent des structures physiques de la colonialité. Le Humboldt Forum, nouveau musée d’ethnologie ouvert au centre-ville de Berlin dans les murs reconstruits d’un du château prussien, pourrait être compris comme un exemple de cette « punition coloniale »7 encore opérante d’après Fogha.

Il est indéniable que les processus de restitution, tels qu’ils sont actuellement mis en œuvre, génèrent des situations asymétriques. D’abord, car ilsdémobilisent les sociétés africaines de ces questions. Comme cela a été discuté lors des tables rondes de la 12eme Biennale de Berlin, le principe de la restitution suppose que celui qui restitue n’est pas celui qui réclame. Pourtant actuellement, la restitution qui est posée comme un acte de réparation et de « création d’une nouvelle éthique relationnelle » entre l’Europe et l’Afrique,engendre une dynamique dépendante des volontés, des sentiments, des vœux, mais aussi des législations des Européen.ne.s. Les anciennes puissances coloniales sont détentrices de la manière dont elles souhaitent revenir sur cette injustice. Les communautés qui ont été spoliées n’ont qu’un pouvoir de décision et d’action restreint.

Cette situation asymétrique tient aussi au fait que le débat est centré sur le retour des objets tout en occultant la plupart du temps la manière dont les objets sont arrivés en Europe. Pourtant, ces objets peuvent provenir d’expéditions punitives au cours desquelles un nombre important de personnes  des gens ont été tués. Il faut parler de la réparation et de la réhabilitation de cette histoire en y incluant leur histoire et également en évoquant les objets qui ont été détruits durant les agressions coloniales.

Ainsi, la restitution, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, ne nous semble pas être une solution ou une réparation, elle ne rompt pas suffisamment avec les structures de pouvoir asymétrique en place. Comment peut-on penser les objets restitués avec leur identité en excès – c’est-à-dire avec les pleurs et les vies des gens qui les ont fabriqués, et avec les récits des actes de ceux qui ont œuvré pour leur retour ? Les débats sur la restitution ne dévoilent que la partie immergée de l’iceberg, car il y a peut-être 500 000 objets africains en Europe8.

Plus généralement, il est probable que les débats sur la restitution deviendront vite obsolètes s’ils n’engagent pas une réflexion profonde sur les prolongements actuels de la période coloniale qui se manifeste par l’appropriation des terres africaines, l’exploitation minière du continent par des multinationales, la pollution sans vergogne des eaux et des sols africains, et bien d’autres phénomènes. Ces faits montrent une autre dimension de la colonialité, à savoir la conception coloniale et capitaliste toujours active de l’environnement naturel considéré comme ressource matérielle, qui a aujourd’hui des conséquences dramatiques. Ainsi, si les institutions muséales en Europe servent de relai auprès de la société civile pour diffuser de nouveaux débats politiques et mémoriels, notamment en ouvrant les débats sur la restitution des biens culturels, elles maîtrisent en même temps les conversations. Alors que les débats sur les objets pillés passent par la porte d’entrée avec tambours et trompettes, les dénonciations de l’extractivisme et de l’exploitation des territoires par des multinationales (principalement européennes, états-uniennes, chinoises, indiennes) sont masquées par cette dette coloniale.

Ainsi, les promoteurs du Humboldt Forum ont créé un « magasin » pour permettre « l’examen de la colonisation ». Il faut malheureusement se demander si cet espace ne sert pas à se débarrasser de l’histoire problématique en la confinant, s’il ne travaille pas à la rendre plus digeste ? Tout cela est regrettable car en s’engageant dans le processus de restitution des objets, les musées occidentaux auraient pu se questionner eux-mêmes et se demander comment survivre sans ces objets. Cette question importante permettrait aux sociétés européennes de changer, de se transformer et de veiller à ne pas réitérer des processus de prédation et de violence.

Nous pensons qu’il est important de percevoir les musées comme des espaces qui colonisent les esprits, les concepts et les pratiques. Les musées ont conçu l’Afrique comme un continent contenu dans sa « culture matérielle ». Si les restitutions sont à saluer et sont nécessaires, cela ne veut toutefois pas dire que les sociétés africaines ne peuvent pas vivre sans ces objets. Les communautés anciennement colonisées ont bien entendu réinventé des patrimoines disparus. Elles ont créé à nouveau, ont engendré de nouveaux artefacts.  En maintenant des catégories contestées – telles que « la culture africaine », « la sculpture bamiléké » – le processus de restitution actuel contribue à figer « l’Afrique » dans une temporalité immuable. Autrement dit, les musées provoquent une résurrection de fantômes africains, mais ils ne s’engagent pas à créer un espace pour permettre aux personnes, africaines avant tout, d’être vivantes. C’est une façon de ressusciter une Afrique morte et passée (et dont l’histoire est façonnée par le prisme occidental), qui conduit à freiner la renaissance des sociétés africaines. De quelles manières, en examinant les processus de la colonisation, peut-on créer un « agenda » pour notre futur ? Actuellement, les débats ne sont pas orientés vers l’Afrique et vers l’avenir du continent, mais semble plutôt servir aux musées européens. Pourtant le retour des objets devrait permettre de revenir sur des événements passés, de réfléchir à l’écriture endogène de l’histoire, que la colonisation a occultée. Ce retour des objets est nécessaire pour revoir des points de vue, des traditions et des cultures africaines. Ainsi, comment peut-on tirer profit des restitutions pour développer « nos » propres expositions, « nos » propres musées ? L’analyse des deux musées béninois actuellement en construction et qui doivent recevoir des pièces restituées par la France (le MIME à Ouidah et le Musée de l’épopée des Amazones et des rois du Dahomey à Abomey) révèle les influences, les dépendances, voire la mainmise occidentale sur l’édification de ces nouveaux espaces. Ils sont financés par le FMI et par l’AFD (Agence française de développement), conçus par des architectes français, construits par des entreprises occidentales et chinoises. Les entreprises locales sont souvent écartées des marchés publics car jugées incompétentes. Les cultures constructives et esthétiques endogènes, et, plus largement, les savoirs extraoccidentaux sont déconsidérés. Quels seraient des musées différents des concepts muséographiques et scénographiques eurocentrés ? Quelques tentatives ont eu lieu, toutefois elles ne sont pas assez nombreuses.

À l’instar des réflexions d’Achille Mbembe9, qui soumet l’impossibilité de représenter, d’institutionnaliser et de muséographier la figure de l’esclave, il est impératif de nous demander s’il est réellement possible de réaliser une exposition sur la décolonisation, une exposition qui soit décoloniale et décolonisée ? Car en effet, la décolonisation ne consiste pas à créer des choses, mais se propose de s’affranchir de l’objectification, pour répondre au besoin de justice, de mémoire et de transmission historique, spirituelle et culturelle. Ce besoin ne peut se traduire uniquement par le retour d’objets.

Au contraire, la restitution – ou du moins la réclamation des objets spoliés – constitue une première étape propre à l’émergence d’un processus décolonial autochtone. Elle pourrait devenir la “restitution” du “indigenous decolonial world-making agenda » [agenda décolonial pour la construction de mondes autochtones]. Les manières dont les communautés africaines pensent, remémorent, formulent ou conceptualisent la décolonisation sont primordiales. Durant les luttes pour les indépendances, les mouvements anticoloniaux ont été initiés par des leaders africains comme Thomas Sankara ou Kwame Nkrumah, mais aussi par des « grassroots movements » [mouvements  populaires]. Par exemple, plusieurs soulèvements de femmes au Cameroun, ont connu une certaine ampleur à partir de 1954, décrite entre autres dans les travaux de Meredith Terretta10.

La résistance anticoloniale n’est pas seulement « théorique » en Afrique et a lieu souvent dans des espaces hors des universités ou des musées, sans les labelliser ainsi. Dans la musique, par exemple, le mot décolonisation est rarement prononcé alors que les questions d’émancipation, de liberté, d’autonomie, de conquête sont exprimées comme une action puissante, un mouvement et un rythme. Comme en témoignent les recherches d’Ibrahima Wane qui relatent le rôle des chansons populaires au Sénégal pendant les périodes coloniale et post-coloniale11. Leurs propos engagés interrogeaient l’ordre colonial ou politique et revendiquaient le recours aux langues locales (wolof, peul, diola) pour toucher une large audience. Après avoir servi aux propagandes coloniales, les radios africaines ont fonctionné comme des vecteurs de résistance et de mobilisation pour les populations africaines12.

Les travaux menés par Fogha13 invitent à prolonger ce décentrement à partir de l’histoire du royaume Nso (au Nord-Ouest du Cameroun), fondé par la reine Ngonnso. Après sa mort, une sculpture a été créée à son effigie et fut dotée d’une force spirituelle. Elle a été volée en 1902 lors d’une expédition dite « punitive » coloniale allemande durant laquelle le palais royal a été brûlé et 800 personnes ont été abattues. Depuis, une chanson a été composée par Yaa Shongka, une princesse Nso. Cette chanson, comme la plupart des chansons traditionnelles Nso composées, n’a pas de titre particulier. Elle est interprétée dans un style traditionnel connu sous le nom de Chong, à la fois un genre musical et un culte sacré pour les femmes. Cette chanson, comme beaucoup d’autres chansons de Nso qui traitent de la colonisation, raconte l’histoire de l’invasion allemande et de l’incendie du palais de Nso, en déplorant les pillages et les meurtres qui l’ont accompagnée. L’interprétation de ce chant se fait en cercle. Il a été repris dans plusieurs endroits avec différentes personnes, mais toujours avec la même manière de danser, de performer. Ce chant raconte la création d’un monde à la fois fugitif et instable, tout en étant ouvert. Un monde qui favorise la mise en relation des un.e.s avec les autres. Il est aussi entendu comme un cri de guerre en invitant les personnes non seulement à danser sur son rythme, mais aussi à l’utiliser comme une impulsion pour une action décoloniale en exhortant aux anciens colonisateurs et aux sympathisants de la colonisation de rendre des comptes.

Dès la fin des années 1990, et après la découverte par le professeur Bongasu Tanla Kishani, de la statue de Ngonnso au Musée ethnologique de Dahlem à Berlin, la communauté Nso et sa diaspora se sont mobilisées pour exiger son retour14. Après trois décennies de requêtes, d’appels, de manifestations, le gouvernement allemand a annoncé la restitution de cette sculpture en juin 2022. Durant une des conventions annuelles de la communauté Nso de Berlin et Bruxelles, en août 2022, un atelier a été mené auprès d’enfants nés en Europe et originaires de Nso qui n’avaient jamais vu l’objet – ou le sujet – de Ngonnso. Il leur a été demandé de la dessiner. Ils l’ont dessiné, mais avec sa vitrine, parce qu’ils ont toujours vu cet objet entouré de cette protection en verre. Pourtant, il y en a eu des représentations très différentes. Dès lors, la réactivation d’objets ne signifie pas qu’il faille les réutiliser de la même manière. Ces différentes représentations peuvent inspirer de nouvelles créations, développer un nouvel imaginaire sociétal qui serait délié de l’Europe. Il y a maintenant deux objets : la vitrine et Ngonnso. La vitrine représente l’Europe et Ngonnso la communauté. Cette vision donne l’opportunité de dessiner une nouvelle société qui pourrait dépasser celle qu’elle était dans le passé et celle qu’elle est devenue au contact des Européen.ne.s, source de nouvelles connexions. Elle devient une opportunité de dessiner un monde à venir et à composer, au-delà d’une dichotomie coloniale encore active.

Autrement dit, la restitution ne peut pas vraiment être effective, si elle se restreint à un simple « retour des artefacts devenus œuvres ». Elle doit être pensée comme celle d’objets en « excès d’eux-mêmes », qui peut le concevoir comme un sujet de conversation, un sujet en exil, un sujet doté de conscience.

Penser la restitution met en relation des communautés éloignées : elle pourrait permettre un « cosmopolitanisme » transnational, un espace de dialogue qui puisse concilier ontologies africaines et ontologies européennes. Un cosmopolitanisme qui n’est pas universel, mais subjectif, décentralisé ou pluri-centré.


  1. Notons qu’en 2006, sous le gouvernement d’Evo Morales Aymala, la Bolivie a créé un vice-ministère de la Décolonisation, sous la tutelle du Ministère des Cultures. Cette nouvelle administration avait pour visée de décoloniser les institutions publiques. 

  2. L’Italie – qui n’a pas connu de période de colonisation à grande échelle – a rendu à l’Éthiopie l’obélisque d’Aksoum, en 2005, après plusieurs demandes de restitution. Cela n’a pas engendré la mise en place d’un comité spécifique pour la restitution des œuvres d’art spoliées pendant la période coloniale. 

  3. Le mot « objet », ici, faute d’avoir une terminologie partagée par tous, englobe la charge esthétique, fonctionnelle et spirituelle de ces biens et leurs multiples configurations (tour à tour, et parfois simultanément artefacts, outils, œuvre d’arts, objets de rituels, etc.). Britta Lange emploie l’expression « objet sensible » et Souleymane Bachir Diagne parle des « objets mutants ». Toutefois, nous avons conscience que comme beaucoup de mots aujourd’hui repris par les extra-occidentaux, la catégorie « objet » ne correspond pas aux concepts existants ou aux catégories opérantes dans les pays de leur production. 

  4. Sur les enjeux de la restitution, voir : Felwine SARR, Bénédicte SAVOY, Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle éthique relationnelle, 2018. 

  5. Voir par exemples : Les expositions permanentes du Musée d’histoire de Nantes (France) avec la « saison décoloniale », le Musée de Tervuren (Belgique) et le Tropen Museum (Musée des Tropiques). « Décadrage décolonial » au Centre Pompidou de Paris (nov. 2022 – fev. 2023), Biennale de Berlin MKB, « Identités décoloniales. De l’Afrique à Mons » au Musée Mémorial de Mons (Belgique, mai 2022 – mai 2023). 

  6. Jennifer Eichstedt, Stephen Small, Representations of Slavery : Race and Ideology in Southern Plantation Museums, Washington, Smithsonian Institution Press, 2002. À l’inverse, les narrations « black centric » développent la brutalité dont ont été victimes les esclavisé.e.s, ou les stratégies de résistance et de résilience qu’ils ont mises en place. 

  7. Wan wo Layir [Fogha Refem], « The Palace we go to die: From Punitive Expeditions to Punitive Exhibitions », Humbolt Forum Magazine [en ligne], 2022. https://www.humboldtforum.org/en/magazine/article/the-palace-we-go-to-die-in-from-punitive-expeditions-to-punitive-exhibitions/ 

  8. D’après le rapport Sarr-Savoy, le Musée royal de l’Afrique Centrale (Belgique) détiendrait 180 000 objets volés, le Humbolt Forum 75 000, le Musée du Quai Branly (France) 70 000, le British Museum (RU) 69 000 et le Weltmuseum of Vienna (Autriche) 37 000. 

  9. Achille Mbembe, « L’esclave, figure de l’anti-musée ? », Africultures, n° 91, 2013, p. 38-42. Voir aussi : Achille Mbembe, Politique de l’inimitié, Paris, La Découverte, 2011.  

  10. Meredith Terretta. Petitionning For Our Rights, Fighting For Our Nation : The History of the Democratic Union of Cameroonian Women, 1949-1960, Bamenda, Langaa RPCIG, 2013. 

  11. Ibrahima Wane, « Chanson populaire et conscience politique au Sénégal : l’art de penser la nation », Thèse de doctorat, Université Cheikh Anta Diop, Dakar, 2014. 

  12. Bangaly Camara, De la « Radio banane » à La Voix de la révolution: L’expérience radiophonique en Guinée, Éditions L’Harmattan, 2017. 

  13. La recherche doctorale menée par Fogha Refem contribue à ce travail d’exploration de nouvelles épistémologies. Intitulée « Ontologies In Conversation’: Restitution As A Cosmopolitan Practice », elle porte sur les récits alternatifs portés par la communauté Nso sur la restitution et les mémoires coloniales. 

  14. Pour une chronologie des actions, voir le rapport établi par l’association « Sysy House of Fame » intitulé Bring Back Ngonnso (2021). https://sysyhouseoffame.org/2021/10/21/bringback-ngonnso-campaign-the-report/